Il n’est pas toujours simple et naturel de manger. Certains bébés ou jeunes enfants n’arrivent pas à développer une alimentation leur permettant de grandir et grossir. Mais surtout, ils ne peuvent développer une alimentation “plaisir”.
DÉFINITION
En France, on parle de trouble de l’oralité alimentaire (TOA) ou troubles de l’oralité pour designer ces difficultés.
Mais en VRAI, on trouve encore plein d’autres termes pour désigner ce trouble : syndrome de dysoralité sensorielle, phobie alimentaire, hypersélectivité alimentaire, troubles de la déglutition, anorexie…
Outre Atlantique, on trouve encore une terminologie différente. Au Canada on parle de dysphagie, en France, ce terme désigne “une sensation de gêne ou de blocage ressentie au moment de l’alimentation, lors du passage des aliments dans la bouche, le pharynx ou l’œsophage”.
Dans les pays Anglo-saxon, on va parler de “Feeding disorder“, la traduction littérale est : trouble de l’alimentation. La définition est “un trouble qui apparaît dans la petite enfance ou pendant la petite enfance, il se caractérise par le refus de manger certains groupes alimentaires, textures, solides ou liquides pendant une période d’au moins un mois, entraînant une perte de poids, de croissance ou un retard de développement“.
Les troubles de l’oralité alimentaire sont définis comme des difficultés pour téter, refus du biberon, des enfants difficiles lors du repas avec des refus de mettre en bouche, des aversions au morceaux, des réflexes nauséeux exacerbés ou encore des vomissements.
Si on devait retenir une définition des troubles de l’alimentation du bébé et de l’enfant ce serait :
Un trouble qui apparaît dès la petite enfance ou pendant la petite enfance. Il se caractérise par le refus de téter au sein ou au biberon. Des difficultés pour manger certains groupes alimentaires, textures, solides ou liquides pendant au moins un mois ayant des répercussions sur la santé (poids, croissance, développement) ou sur la participation sociale (famille, garde, école, loisirs).
LA PRÉVALENCE
On pense que ce trouble n’est pas si courant chez les bébés et les enfants, mais certaines études parlent de 13 à 50% de la population pédiatrique normale.
Quand on se penche sur la population avec des troubles du développement la prévalence passe à 80%.
Les enfants avec TSA (Trouble du Spectre Autistique) présentent fréquemment des troubles de l’alimentation qui sont bien souvent en lien avec des troubles d’intégration sensorielle ou troubles du processus sensoriel (difficultés au niveau de la perception sensorielle et/ou de la modulation sensorielle).
On estime que 56 à 87% des enfants avec TSA présentent un trouble de l’alimentation (Burklow, Phelps et al., 1998 Linscheid, 2006 Lefton-Greifand Arvedson, 2007).
LES ENFANTS À RISQUE
D’après l’expérience clinique, on sait maintenant que certains enfants ont plus de risques de développer un trouble de l’alimentation :
- Les enfants nés prématurément, par exemple, de part les soins précoces, peuvent avoir des difficultés dans l’alimentation dès le début mais aussi plus tard, lors des transitions dans le parcours alimentaire.
- Les enfants souffrant d’un RGO (reflux gastro-œsophagien) important avec des douleurs récurrentes quand ils mangent, vont développer, assez souvent, des difficultés notamment lors du passage aux morceaux.
LA CLASSIFICATION
Bien souvent, quand un enfant ne mange pas on peut entendre certaines petites phrases comme “c’est psychologique“, “si tu le laisses sans manger, il finira bien par manger” ou encore “ne t’inquiète pas, ça va venir“.
Mais il faut savoir que dans 90 à 97% des cas, les troubles de l’alimentation ont une cause organique et/ou sensori-motrice.
Pour comprendre les troubles de l’alimentation il faut donc évaluer le bébé ou l’enfant, son environnement et l’impact de ses troubles dans l’occupation en général.
Pour comprendre les difficultés, le thérapeute doit remonter au début du développement sensoriel et de l’alimentation, c’est ce qu’on appelle faire une anamnèse.
Il est nécessaire de comprendre le fonctionnement sensoriel de l’enfant en lien avec l’alimentation mais aussi les compétences fonctionnelles.
Enfin, il faudra évaluer l’impact affectif, comportemental et psychologique des troubles de l’alimentation sur l’enfant et sur sa famille.
Pour bien accompagner le bébé ou l’enfant, il faut pouvoir déterminer les causes des troubles de l’alimentation et répondre par notre accompagnement aux besoins de l’enfant et de la famille.
PHASE DE PHOBIE OU TROUBLE DE L’ALIMENTATION ?
Il est nécessaire de proposer un accompagnement quand un bébé ou un enfant présente des difficultés dans quatre domaines de l’alimentation : la quantité, la durée, la diversité et le comportement.
- La quantité : elles vont être en dessous de l’apport nécessaire pour bien grandir et grossir. Au niveau médical, des cassures ou des stagnations peuvent être observées dans la courbe de poids. Il se peut également qu’un bébé ou un enfant soit incapable de se nourrir par la bouche.
- La durée : les repas seront parfois beaucoup trop longs. Un bébé peut mettre 45 minutes pour prendre une petite quantité de lait au biberon. Un enfant passera beaucoup de temps à mastiquer une bouchée sans pouvoir gérer son repas en globalité.
- Diversité : elle correspond à la diversification du panel alimentaire, c’est à dire le nombre d’aliments que l’enfant peut manger. Il est bien souvent restreint ou alors limité à certains aliments que l’enfant peut consommer en très grande quantité. Quand on proposera à l’enfant un changement dans ses habitudes alimentaires, il pourra avoir des nausées, des vomissements ou des haut-le-cœur.
- Comportement : le bébé ou l’enfant qui présente des troubles de l’alimentation aura des réactions exacerbées et parfois incontrôlables au moment du repas ou, si on le met en contact avec un aliment qu’il ne tolère pas. il peut se mettre en pleurs, en colère ou préférer l’évitement (comme le bébé qui va dormir systématiquement au moment du repas). L’enfant va se désorganiser devant un aliment et ne va pas réussir à se réorganiser pour continuer le repas.
On parle de trouble quand les différents paramètres, ci-dessus, sont impactés au moins pendant 1 mois.
QUE FAIRE ?
Il est préférable de ne pas attendre.
- Un bébé qui a des difficultés pour téter : il est nécessaire de consulter un thérapeute qui saura proposer une aide au niveau du positionnement, des gestes d’aide à la succion…
- Un bébé qui n’arrive pas à boire au biberon : on pourra proposer d’aider les parents à trouver la bonne tétine, qui sera adaptée à la taille de la bouche de l’enfant, à sa sensibilité buccale ou encore à la force de succion.
- Un bébé qui n’arriverait pas à diversifier vers une alimentation à la cuillère : il est nécessaire de mettre en place une guidance parentale pour accompagner la famille sur des petits jeux, des outils, des adaptations des purées (couleur, goût, texture).
- Un jeune enfant de 12 mois qui refuserait catégoriquement les morceaux : il serait intéressant de lui proposer une découverte sensorielle des aliments afin qu’il puisse les reconnaître pour ensuite les apprécier.
En résumé, je ne pense pas qu’il soit nécessaire “d’attendre que cela vienne” mais d’écouter les mamans et les papas, afin de proposer un accompagnement précoce.
A mon sens, il vaut mieux prévenir que guérir.
Marie RUFFIER BOURDET
Ergothérapeute/Occupational thérapist
14 Commentaires. En écrire un nouveau
Bonjour
Mon fils a eu 2ans le 1er avril
Il a déjà mangé à l’assiette et comme un grand et comme nous depuis la diversification alimentaire
Mais depuis peu il refuse
Il est plutôt biberon gourdes gâteaux
Est-ce normal ? Dois-je m’inquièter ?
Et quand il va chez son père 1 journée par week il refuse tout pourtant il s’amuse joue boit mais 0 repas même des choses qu’il adore dont je donne conseils à son père
Merci d’avance
Bonjour Amélie,
Merci pour votre message. Difficile de répondre sans faire un bilan complet de votre fils et de son alimentation. A cet âge cela peut être de la néophobie alimentaire. Le mieux serait de faire le point avec un professionnel de santé. Vous pouvez prendre rdv sur notre plateforme avec une de nos diététiciennes pédiatriques qui pourra vous accompagner https://mapetiteassiette.com/plateforme/
Bonjour
Ma fille de 8 mois ne veut pas manger.
A la 3eme echographie, le medecin a diagnostiqué un retard de croissance in utero et elle est née prématurément (37 sa) après declenchement (cela faisait une semaine que j’avais perdu les eaux).
Je l’ai allaité jusqu’à ses 3 mois et demi, puis nous sommes passé au biberon. Elle prenait très bien le sein, grossissant bien. Le biberon pareil, même si ce n’est pas une grosse mangeuse (elle laissait souvent 30 à 60ml sur 210ml).
Elle n’est pas intéressée par la cuillère, alors nous avons commencé la diversification tard (6mois et demi) depuis elle mange 2-3 cuillères de purée et de compote.
Il y a 3 semaines, elle a commencé à ne plus vouloir ni du biberon, ni de la cuillère. Elle buvait au maximum 120ml le matin et le soir et à peine 60ml le midi et l’après-midi. Elle ne veut plus de la cuillère. Cela c’est amélioré pendant 4 jours où elle mangeait mieux mais depuis ce week-end (nous sommes mercredi) elle recommence à ne plus manger.
Cela peut il être du à un trouble de l’oralite ?
En parallèle, elle aime bien mettre les objets à la bouche, mais elle ne ressent pas le besoin de manger (elle ne réclame que le soir), et n’a aucun plaisir à manger (on a l’impression de la gaver )
Aujourd’hui, elle a de l’énergie mais elle est plus vite fatiguée et je la trouve moins souriante
Bonjour,
Merci pour votre message et surtout votre confiance. Il est pour nous difficile d’analyser la situation dans son ensemble si nous n’avons pas toutes les informations. Si cela fait quelques jours que votre enfant ne se nourrit pas, ou très peu, il sera indispensable de consulter un médecin afin de ne prendre aucun risque. Précisez au mieux votre situation au moment de votre demande pour que votre fille soit prise en charge au plus vite et qu’il n’y ait pas de cassure au niveau de sa courbe de croissance. Si vous avez le moindre doute n’hésitez pas à contacter votre pédiatre. Et si cela peut vous aider, nous proposons actuellement un suivi nutritionnel pour les enfants directement sur notre plateforme : plateforme.mapetiteassiette.com. Ainsi vous retrouverez notre équipe de diététiciennes pédiatriques qui pourra vous aider et vous guider durant cette étape.
Dans l’espoir que cela puisse vous aiguiller.
Bonjour. Mon petit loup de 13 mois a toujours été difficile avec les biberons (de LM car monsieur est APLV et refuse les laits pour allergiques) des suite de son RGO interne mais il mangeait extremement bien ses purées dès le départ. Or depuis 2 mois c’est la dégringolade totale jusqu’au refus de s’alimenter depuis 10 jours (il y a 2 mois il a vomis pendant sa sieste et a manqué de s’étouffer, a ensuite fait une otite puis une bronchite mais son appétit était revenu à la maison – à la crèche elles devaient ‘l’obliger’ pour les premières cuillères ce qui ne m’a jamais plus…maintenant il refuse ses purées partout). J’ai essayé de passer aux morceaux, il va accepter certaines choses (saumon, humous, pain, fruits, jambon mais c’est tout), ça n’aide pas. C’est en enfer en ce moment. Nous avons rdv avec une gastro et une pédiatre pour troubles de l’oralité fin du mois…est-ce qu’un enfant peut être traumatisé au point de rejeter l’alimentation suite à des vomissements et comment faire pour le faire tenir sans trop de perte de poids jusque là…? Merci d’avance (une maman desespérée)
Bonjour,
Merci à vous pour votre message et votre confiance. Pour répondre à votre interrogation, effectivement des vomissements à répétition, un risque d’étouffement et le fait de forcer l’enfant à manger avec la cuillère peuvent être source d’un refus alimentaire. Cependant, si cela fait 10 jours que votre enfant ne se nourrit pas, ou très peu, il sera indispensable de consulter un médecin en urgence afin de ne prendre aucun risque. Précisez au mieux votre situation au moment de votre demande pour que votre petit loup soit pris en charge au plus vite et qu’il n’y ait pas de cassure au niveau de sa courbe de croissance.
Dans l’espoir que cela puisse vous aider.
Bonjour,
je suis la maman d’une petite fille de 6 mois. Jusqu’à 3 mois, mademoiselle a souffert de coliques et régurgite bcp après chaque biberon encore à l’heure actuelle. Nous avons débuté la diversification à l’âge de 4 mois.
Depuis le début, elle ne prend que quelques cuillières le midi (purée) et au gouter (compote). Je précise que je cuisine moi même ses repas. Actuellement, elle a 6 mois et mange très peu. Que faire ? Dois-je consulté ? si oui, quel médecin ou professionnel serait à l’écoute et pourrait éventuellement diagnostiqur un trouble alimentaire ?
merci de votre aide précisieuce…
Bonjour Camille,
Merci pour votre message. Vous pouvez déjà parler de vos inquiétudes au médecin de votre fille, il pourra ainsi voir s’il y a un souci avec sa courbe de croissance ou bien quelque chose qui pourrait la gêner et vous orienter vers un autre professionnel de santé si besoin.
Si vous souhaitez aller plus loin, vous pouvez consulter un orthophoniste/ergothérapeute/diététicien spécialisé en alimentation pédiatrique (et en troubles alimentaires) afin de faire un bilan.
Bon courage
Bonjour, mes jumelles de un an nées à 30sa, ont été nourries par sonde. Depuis le début je rencontre des difficultés à les nourrir. Elles ont mis bcp de tos à prendre des biberons, j’ai du les nourrir à la pipette… et maintenant ce sont les repas, une vraie torture pour elles et pour moi. Elles hurlent dès qu elles voient une cuillère, pleurent, mettent les mains devant la bouche, se frottent le nez… je dois leur donner des jouets pour les nourrir, ca finit en hurlement… je suis à bout et si triste de ne pas comprendre mes filles, j’ai l’impression de les traumatiser… qui dois je aller voir sur paris ? Merci de votre aide
Bonjour,
Vous avez plusieurs services de consultations pour les troubles de l’oralité à l’hôpital Necker ou Robert Debré. N’hésitez pas à contacter l’association http://www.groupe-miam-miam.fr/ qui vous aiguillera au mieux.
Bon courage !
Bonjour,
Je suis Marie l’ergothérapeute qui a écrit article. je me permets donc de vous répondre.
En tant que professionnel de la petite enfance, il me semble important que vous puissiez repérer les signes d’appel au niveau des difficultés alimentaires.
Le repérage précoce permettra de mettre en place une intervention rapide pour accompagner l’enfant et la famille.
Une fois que vous aurez identifié les signes, vous pourrez échanger avec les parents sur leurs ressentis par rapport aux repas. S’il le souhaite, ils peuvent ensuite prendre rendez vous avec thérapeute formé aux troubles de l’alimentation (orthophoniste, ergothérapeute, kinésithérapeute, psychologue, psychométricien…)
Vous pourrez également objectiver la persistance des difficultés dans des cadres différents.
L’anamnèse à proprement parlé, est un recueil des antécédents médicaux et de l’histoire de la plainte qui est effectuée par un professionnel médical ou paramédical.
cordialement
Bonjour Marie
Mon problème avec mon bébé commence de l age de 2 mois bébé à commence de refuser les seins et après son biberon il avait des cassure au niveau de sa courbe c pour ca il était hospitaliser beaucoup de fois sans aucune solution et après on a découvrir qui il fait des fausse routes on épaissir son lait il accept ça pour une période mais maintenant il refuse complètement de boire et de manger il a 14 mois et il pèse 8kg
Bonjour et merci pour cet article intéressant. Je suis assistante maternelle et souhaite savoir si je peux être en mesure de faire moi-même cette anamnèse ?
Bonjour,
Marie vous a répondu plus haut 😉
Belle journée